Quelle démarche authentique engager pour peindre en s’inspirant de la nature et donner corps à son tableau ? On a posé la question à 4 peintres portés sur l’inspiration de la nature aux 4 coins de la France. Tous s’accordent à dire qu’un temps d’observation et une immense patience sont requis pour s’emparer de la force d’un paysage ou d’un animal.
Lise Vurpillot (Doubs) est peintre animalier figuratif (style artistique qui représente la forme de quelque chose, souvent opposé à l’art abstrait), et expressionniste. Joël Simon (Orne) est peintre aquarelliste figuratif. Quant à David Pons (Puy-de-Dôme), il se considère comme peintre de paysages « restructuraliste ». Lionel Wibault (Haute-Savoie), lui, est peintre de haute montagne. Ces artistes de la nature ont un point commun qui les anime : pour retranscrire une nature vibrante, ils s’emparent de sa profondeur et la rendent palpable, comme animée. Chacun nous livre son approche personnelle et ses conseils pour une immersion nature vivante.
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Secret de Nature l'a interviewé sur son approche du paysage dans ses différentes œuvres, il nous explique sa vision.
On a tous notre jardin secret, notre endroit refuge où l’on se sent pleinement soi. Ce sentiment de plénitude est encore plus fort chez les artistes. C’est là qu’ils puisent leur inspiration pour réaliser leur œuvre. Et vous, quels sont les endroits d’inspiration nature qui vous parlent ?
Lise Vurpillot : « Lorsque je suis prête à rencontrer la nature, les animaux. Il y a des lumières fantastiques toute la journée, les reflets modifient ma perception du paysage. Une brise et tout change. Même lorsqu’il fait mauvais, il y a des contrastes et des couleurs incroyables. »
Joël Simon : « Tous les endroits sont bons pour peindre en s’inspirant de la nature, pourvu qu’une partie attirante du paysage en devienne le centre d’intérêt. Quant aux meilleurs moments, pour moi, c’est le matin et la fin d’après-midi pour éviter l’effet écrasant d’une lumière zénithale. »
David Pons : « Matin et soir, la lumière est plus belle. Pour l’endroit, je me laisse inspirer par les lumières marines, la puissance des montagnes et la poésie des burons auvergnats. »
Lionel Wibault : « En tant que peintre et guide de haute montagne, c’est de peindre à 360° autour du Mont-Blanc. C’est une lutte pour défier températures négatives, vent, orages… Mais c’est mon péché mignon ! À 4000 m d’altitude à 6 h du matin, les lumières sont étincelantes sur le massif. »
Un peintre a toujours une idée derrière la tête, même inconsciente. Lorsqu’il projette de réaliser une œuvre, il cherche à ressentir et à faire ressentir quelque chose - une émotion, un regard, une lumière, un souvenir, un vécu… Et vous, qu’est-ce que vous cherchez en peignant la nature ?
Lise Vurpillot : « Rencontrer, échanger du regard. Je rencontre d’abord un sujet avant de m’attaquer à lui. Je reste longtemps pour que l’animal s’habitue à moi et que, s’il le souhaite, décide de s’approcher. Les regards montrent la sensibilité des animaux. J’imleur couleur de peaumortalise l’instant où ils me voient, me regardent, se questionnent sur mes intentions. Je pose en couleurs ce moment chargé d’émotions et de bienveillance.»
Joël Simon : « La lumière, le beau, pour magnifier la nature. Selon la destination choisie et la saison, les sujets s’imposent. Aventurier, je suis à l’écoute de cette nature surprenante. »
David Pons : « Je cherche la liberté des grands espaces, les lumières dans le ciel et la neige. »
Lionel Wibault : « Je peins ce que j’ai vécu. Vous n’êtes jamais sûr du résultat quand vous partez en haute montagne, surtout que vous ne pouvez pas revenir facilement le lendemain vous installer confortablement sur votre chaise, mais c’est cet inconfort qui rend le tableau plus réaliste ».
Peindre c’est choisir un cadre, un geste, un moment de la journée... Lorsque l’artiste arrête son regard sur un aspect de la nature, c’est plus fort que lui, il est happé par la beauté de l’instant. Qu’est-ce qui retient particulièrement votre attention ?
Lise Vurpillot : « Je capte les postures et mouvements d’animaux, leur couleur de peau, les effets du vent dans leurs poils, à travers des croquis. L’appareil photo m’aide pour capter les regards. Et la lumière arrive comme cerise sur le gâteau. »
Joël Simon : « Je suis guidé par la lumière, puis par le sujet qui capte et renvoie cette lumière. Un même paysage à des moments différents libère des interprétations enrichies. »
David Pons : « Au début d’une observation de la nature, je ne vois pas la toile blanche : j’ai déjà une idée, comme si je voyais déjà le tableau. »
Lionel Wibault : « J’ai passé des milliers d’heures en montagne, en perpétuelle observation de la nature. Ma mémoire a enregistré des tas d’effets de lumière malgré moi. Pour immortaliser le paysage, lui donner de la profondeur, il faut peindre ce qu’il y a entre le sujet et vous-même : l’air. »
Il est de ces détails qui révèlent un tableau. Une ambiance qui se dégage d’un paysage, une perspective qui nous emporte au loin, un effet de surprise qui nous embarque, et c’est le sol qui se dérobe sous nos pieds. Qu’est-ce qui fait, pour vous, un tableau réussi ?
Lise Vurpillot : « Une satisfaction personnelle, quand j’arrive à transmettre ce que j’ai ressenti. »
Joël Simon : « Quand il se dégage une atmosphère, sans trop en dévoiler, une harmonie de couleurs, un équilibre de composition… Le bonheur d’avoir capturé la beauté d’un paysage pour la ramener chez soi. »
David Pons : « Un tableau d’inspiration nature avec de la profondeur, du contraste. »
Lionel Wibault : « Quand on découvre quelque chose de nouveau. Habitant près de Chamonix, c’est un spectacle permanent, mais peindre simplement les couleurs ne fera pas le succès. Il faut saisir les instants éphémères, s’emparer de la force du mont blanc qui sort de terre avec une chaleur artistique ! »
Chaque artiste a sa technique, voire son secret, pour révéler le plus beau, le plus fort de la nature. Quel serait votre conseil à donner à un amateur d‘inspiration nature pour peindre en s’inspirant de la nature avec authenticité ?
Lise Vurpillot : « Il y a forcément un détail qui vous a plu et vous donnera envie d’aller plus loin. Un chemin qui demande patience et indulgence. Prenez des bains de nature. Dessinez régulièrement, prenez le temps de regarder autour de vous. »
Joël Simon : « Pour peindre la nature, il faut s’installer dans le sujet, repérer les couleurs, s’imprégner des odeurs, en commençant par des croquis de petite taille. Ne jamais se décourager et rester optimiste pour avoir envie de revenir, de recommencer ! »
David Pons : « Apprenez à observer la nature, à analyser les couleurs : à lire le paysage. Et ne cherchez pas à vouloir finir le tableau avant de l’avoir commencé. »
Lionel Wibault : « Quand vous considérez un tableau comme beau, gardez-le. Si vous vous en séparez, vous ne posséderez plus ce qui plaît à vos yeux ».
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